Visuel Femmes Afghanes : de l’espoir au milieu de ce désastre ?
23.09.21

Femmes Afghanes : de l’espoir au milieu de ce désastre ?

Parmi les horreurs qui se déroulent en Afghanistan depuis la prise de pouvoir des talibans le 15 août dernier, l’avenir des femmes afghanes a été particulièrement commenté. Elles qui depuis une vingtaine d’années se sont tant battues et ont obtenu des avancées immenses en matière de droits et d’égalité, risquent de tout perdre. Mais pour Manizha Wafeq, présidente et fondatrice de la Chambre de commerce et d’industrie des femmes afghanes, il ne faut pas totalement désespérer, pas encore en tout cas.  

Peut-on maintenir un peu d’espoir au milieu de ce désastre ?

C’est difficile, mais même si la situation est terrible, il ne faut pas oublier que les Afghanes d’aujourd’hui sont beaucoup plus éduquées qu’avant et ont un sentiment d’appartenance quand il s’agit de leurs pays. Ça n’a pas toujours été le cas. Pendant les années 90, la participation politique, économique, sociale et culturelle des femmes n’existait pas vraiment. Mais depuis vingt ans, elles ont été fondamentales dans la construction et la vie de tous les jours de ce pays. C’est pour ça que certaines sont sorties et qu’on a vu ces images d’elles qui agitent le drapeau afghan. Je suis certaine que nous verrons de la résistance des femmes afghanes.

Cette résistance a-t-elle déjà commencé ?

D’une certaine manière, oui. Nous voyons déjà des femmes qui refusent de changer leur tenue et sortent habillées comme elles l’ont été pendant 20 ans. Il y a aussi des Afghanes dans tous les domaines, que ce soit la médecine, les médias ou le commerce. Il sera difficile de se passer d’elles et elles ne plieront pas sans lutter. Récemment, plusieurs femmes leaders sont allées rencontrer Dr Abdullah Abdullah, le président du comité de réconciliation nationale et Hamid Karzaï, l’ancien président, pour rappeler l’importance du rôle des femmes dans les négociations à venir avec les talibans. Pas juste au niveau de leurs droits, mais aussi de leur importance pour l’économie. Il faut rappeler qu’il y a en Afghanistan aujourd’hui plus de 57.000 commerces qui appartiennent à des femmes qui ont ainsi créé plus de 130.000 emplois.

Pourtant, les talibans ont annoncé que les femmes devaient rester chez elles en attendant que la situation se stabilise.

Certes, ce genre de déclarations n’inspire pas confiance. Et il ne faut pas oublier qu’il y a un grand décalage entre les villes et les milieux ruraux. Pour autant, l’une de nos membres qui a fondé une garderie pour enfants a posté sur Facebook la simple phrase : « J’ai recommencé à travailler. » C’est intéressant et ça fournit un peu d’espoir. Si elle a recommencé, c’est parce que d’autres femmes l’ont sollicitée pour qu’elle garde leurs enfants, pour qu’elles aussi aillent travailler. J’espère juste aujourd’hui que la communauté internationale ne détournera pas les yeux après 20 ans de construction. Elle a joué un grand rôle dans la lutte pour les droits des femmes. La voir abandonner les Afghanes est ce qui m’inquiète le plus.

Anton Stolper