Visuel Julien Calmeilles, derrière le masque
09.04.21

Julien Calmeilles, derrière le masque

Activiste derrière la page Facebook ACI Stop OGM, Julien Calmeilles, 37 ans, a réussi à faire plier trois enseignes de supermarchés grâce à deux vidéos dénonçant la commercialisation de bonbons blindés d’OGM. Et ce n’est qu’un début.

C’est l’histoire du mec qui voulait juste “poser une tâche” et qui aime illustrer sa vie par des étapes. À 37 ans, Julien Calmeilles est surtout un type qui s’est longtemps cherché et qui a fait le tour des boulots : vente de jouets, préparation de pizzas, réparation de télés, service au bar dans un bowling porte de Champerret… Puis, un jour, le bonhomme, qui a fait des études de comptabilité, entre dans une jeune entreprise de paysage. Huit ans plus tard, il y est toujours, et c’est aussi ce taf qui a fait basculer sa vie. Julien raconte : “Au départ, je ne posais pas de questions, je venais d’arriver, je faisais le travail demandé, point. Je passais du Roundup sur des surfaces enherbées… Mais quand on m’a donné des combinaisons, des masques, des gants, je me suis interrogé sur ce que j’étais en train de faire. Je suis rentré chez moi, je me suis renseigné sur le Roundup et j’ai découvert le monde de Monsanto, des OGM… Un monde catastrophique, monté par des enfoirés de première, qui sont là pour faire de l’argent et qui se fichent de la nature. Il fallait que je fasse quelque chose à mon échelle.” Julien Calmeilles décide alors de descendre dans la rue, d’enfiler un masque pour sauter la barrière de sa timidité et de tendre une pancarte accompagnée d’un message simple : “Qui sème Monsanto récolte la mort.” Les photographes présents adorent, son personnage est né. Mais l’intéressé s’interroge : “Je me suis lancé dans le militantisme comme ça, ça a duré quatre ans, j’ai fait quelques actions avec le groupe Combat-Monsanto et avec Extinction Rebellion mais à un moment donné, ça ne suffit plus. Il me fallait un combat beaucoup plus fort, plus concret.” C’est là que Julien est entré dans un Franprix. Déclic.

Une page Facebook, trois géants pliés

Ce jour-là, l’homme file dans un rayon bio et souhaite récupérer des “petites graines pour le midi”. Ce qu’il y trouve finalement est des paquets de bonbons de couleurs affriolantes et surtout blindés d’OGM. “Tout est parti de là”, sourit-il aujourd’hui. Car derrière, Julien Calmeilles va se procurer une caméra cachée, qu’il va accrocher à une veste en jean, et va visiter plus d’une centaine de supermarchés. “Ils vendaient tous ce type de produits, des bonbons Reese’s, Fluff, Nerds, enchaîne l’activiste. Tous : Auchan, Franprix, Leclerc, Carrefour… Dès que je trouvais des produits, j’interpellais les directeurs mais le problème, c’est que 70% d’entre ne savent pas ce que sont les OGM. Je ne pouvais pas attaquer des ignorants donc j’ai gardé uniquement les vidéos des directeurs qui connaissaient le sujet et m’ont pris pour un bouffon en me disant que c’était le business, etc… Et une fois que j’ai eu suffisamment d’infos, j’ai publié une vidéo sur Facebook, qui a cartonné, en mai 2018”. Et un an plus tard, une seconde. Objectif : faire bouger les lignes et faire retirer de la vente ces bonbons, ce que vont accepter de faire Auchan, Franprix et Monoprix. Julien Calmeilles claironne : “J’ai réussi à faire plier ces trois géants, soit 3800 supermarchés en France, avec une page Facebook. C’est quand même une belle victoire.”

Une victoire qui lui a surtout donné envie de poursuivre son combat car si ces produits ont été retirés des rayons, ils restent commercialisés par des franchisés indépendants qui indiquent parfois la présence d’OGM sur leurs étiquettes en anglais, mais pas celles en français. “Sauf qu’il n’existe pas une version avec OGM et une sans OGM, détaille Julien. J’ai tout balancé à la répression des fraudes, j’ai récupéré des preuves de flagrants délits de mensonge de certains fournisseurs aux supermarchés. J’ai les preuves.” Et elles seront prochainement en ligne, au milieu d’une troisième vidéo qui sera également publiée sur la page ACI (pour Action Citoyenne Individuelle) Stop OGM, que Julien Calmeilles gère seul, appuyé par des proches qui le poussent à continuer la bataille. Masque sur le visage, désormais soutenu par le milieu de l’activisme écologique, le trentenaire a réussi à poser sa tâche et s’apprête à l’étendre.